INTERVIEW
Propos recueillis par : Sébastien Jobart
Photos : Karl Joseph
le lundi 08 mars 2004 - 9 373 vues
Présent sur la scène reggae depuis plus de quarante ans, Freddie McGregor a débuté sa carrière musicale à l’âge de sept ans, aux côtés de Clement « Coxsone » Dodd. Converti au rastafarisme, il signe les albums Mr McGregor, Bobby Bobylon et Big Ship, où il développe un chant très soul inspiré des artistes de Philadelphie. Sa renommée devient internationale dans les années 80, son style Lover Rock s’imposant notamment en Angleterre. Producteur depuis 1989 via son label Big Ship, Freddie McGregor poursuit sa carrière avec philosophie, sans pression.
Reggaefrance l’a rencontré à l’occasion de son passage à l’Elysée Montmartre à Paris le 29 février. Juste le temps d’une interview.
Reggaefrance / Freddie, vous chantez depuis plus de quarante ans… / 41 ans, pour être exact.
…comment vous sentez-vous ? Bien. Heureusement pour moi, j’ai construit un studio d’enregistrement, Big Ship Studio, qui me permet de faire un album quand je veux. Sans pression. Cela nous donne aussi le temps de faire des tournées, d’apporter la musique aux gens.
Vous avez commencé votre carrière très jeune… Oui, j’avais sept ans. C’était en 1963, à Studio One. Je vivais à la campagne, à Clarendon. Deux amis, Ernest Wilson et Pete Austin, qui étaient membres des Clarendonians, m’ont emmené à Kingston, où j’ai rencontré des personnes formidables : Bob Marley, Alton Ellis, Delroy Wilson, Ken Boothe, John Holt, Jackie Mittoo, Don Drummond. C’était très amusant. J’imaginais que Studio One était comme Motown, avec Marvin Gaye, Mickael Jackson, The Supremes, tout ces gens formidables, yuh know ? C’était ainsi jusqu’à ce que j’enregistre ma première chanson. Le ska laissait la place au rocksteady. Je me rappelle que Bob Marley a empilé trois caisses pour que je puisse atteindre le micro, car j’étais trop petit. Je vivais dans la maison de Mister Dodd, avec sa famille. Tous les matins, j’allais au studio avec lui, on ouvrait le studio ensemble, et tous les soirs on fermait le studio et on rentrait à la maison. C’était ce genre de relation. J’étais un enfant tout le temps dans le studio. Il était inévitable que j’apprenne tant de choses en allant à Studio One… C’était un bon studio.
Pourtant, vous avez quitté Studio One pour Channel One, son concurrent. J’ai quitté Studio One en 1979, quand j’ai travaillé pour la première fois avec Niney, sur l’album Mr McGregor. Mr Dodd a ensuite sorti l’album Bobby Bobylon l’année suivante, en 1980, qui avait été enregistré des années avant.
Vous avez créé votre propre label, Big Ship en 1989… On a sorti beaucoup de chansons sur ce label, d’autres vont sortir cette année. Au moment où je vous parle, on a de nouveaux titres en vente en Angleterre. Ce sont des choses à surveiller…
A la fin des années 90, vous avez traversé une période difficile. Musicalement, tout a commencé à être différent. Il faut être attentif aux changements du marché, à ce qui est en train de se passer. Il faut savoir quand sortir un album, si le timing est bon, ou s’il vaut mieux faire encore des tournées. Car la musique change tellement, et très rapidement. Parfois, vous pouvez sortir une production, mais elle arrive au mauvais moment, par rapport à ce qui se fait. Il faut prendre tout ça en considération. Aucun artiste ne reste au top pour toujours. Vous vous faites remarquer, et c’est à vous de faire en sorte que ça dure le plus longtemps possible. Il faut être logique : il ne s’agit pas d’être le numéro 1 chaque année, pendant dix ou vingt ans. De nouveaux artistes apparaissent constamment. Il faut leur laisser la place et savoir se positionner pour, le moment venu, contre-attaquer, comme un cobra.
Quels sont vos projets en tant que chanteur et producteur ? Parfois, quand je vois des gens comme Santana ou les Isley Brothers, ils refusent d’arrêter. J’ai grandi en écoutant les Isley Brothers, depuis l’âge de sept ans. Ces gars ont reçu quelque chose comme sept Grammies, et ils enregistrent toujours des albums. Ils n’ont pas l’intention de s’arrêter, et j’ai la même mentalité. La musique est tout ce que j’ai connu depuis que j’ai sept ans. Je vais continuer à faire des albums, tous les ans ou tous les deux ans, continuer à produire des jeunes artistes, faire tourner la boutique. C’est un business que j’adore, je l’ai choisi. Je serais toujours dans ce business.
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