Il y a 10 ans, Raphaël et son groupe Eazy Skankers remportaient le Rototom Reggae Contest et gagnaient le droit de se produire sur la grande scène du festival italien. Né d’une mère italienne et d’un père nigérian, Raphael est aujourd’hui lancé en solo. Après un premier Ep, "My name is Raphael", il sort l’album "Mind vs Heart" en 2013. En ce début d’année 2015, il est de retour avec la mixtape "Here Comes The Soundblaster", concoctée par le sound system allemand Sentinel, et disponible en libre téléchargement. L’occasion de faire les présentations.
Reggaefrance / Tu as commencé au sein du groupe Easy Skankers. Peux-tu revenir sur tes débuts ? Raphael / J’ai créé le groupe Eazy Skankers avec mon ami Andrea Botaro, le bassiste, quand nous étions encore au collège. J’avais 16 ans à l’époque. Au cours de toutes les années qui se sont écoulées, nous avons fait pas mal de scènes et avons participé à plein de concours musicaux. En 2005, nous avons gagné le Rototom Reggae Contest, ce qui nous a permis de jouer sur la scène principale du Rototom, à l’époque où il avait encore lieu en Italie. Pendant cette période, nous nous sommes forgés une solide expérience et avons enregistré quelques albums. Notre tout premier album a été enregistré dans les sudios Tuff Gong en Jamaïque. Maintenant que je dédie une partie de mon temps à une carrière solo, je reste toujours très proche de mon groupe. Ils sont toujours mon backing band officiel. Et ils contribuent à trois riddims sur mon tout dernier album également, "Mind Vs Heart". Je ne pourrai jamais quitter ou oublier les gens avec qui j’ai joué depuis toutes ces années.
A l’époque vous jouiez des riddims originaux ou des classiques de la musique jamaïcaine ? Nous avons toujours fait de la musique originale, nos propres compositions, nos propres chansons. Je pense que c’est important d’essayer, même en étant jeune, même en prenant le risque de faire des chansons très moches ou de la musique qui sonne faux. Parce qu’il faut bien commencer quelque part et que c’est en pratiquant qu’on s’améliore.
Quand as-tu commencé à poser sur des riddims de divers producteurs ? Depuis 2010, j’ai commencé à faire de plus en plus de travail sous le nom de Raphael et j’ai aussi fait mes premiers enregistrements pour le label italien Bizarri Records. En 2012, nous avons sorti un EP intitulé "My Name Is Raphael". Celui-ci est toujours disponible en téléchargement gratuit sur le site de Bizarri Records. Cela a été ma première sortie officielle en tant qu’artiste solo. J’ai ensuite commencé à recevoir des propositions de différents producteurs de l’étranger. J’ai donc enregistré pour l’Anglais Chris Peckings, les Français de Flash Hit Records, et d’autres…
Si j’avais écouté ma raison, j’aurais certainement fait de la chanson populaire italienne
Et les Autrichiens d’Irievibrations qui ont produit l’album "Mind VS Heart". Avec eux aussi, la vibe et l’alchimie se sont réalisées instantanément. J’ai commencé à poser sur quelques-uns de leurs riddims. Ils m’ont ensuite proposé leur idée de composer un album complet et de travailler ensemble sur ce projet. Il est finalement sorti en CD et en digital. Irievibrations a assuré une bonne promotion et une bonne distribution partout en Europe. Cela m’a permis de traverser les frontières italiennes et d’aller jouer partout en Europe.
Que veux-tu dire avec le titre de cet album ? Ce titre fait référence au combat quotidien qui se déroule à l’intérieur de chacun. Certains de nos choix sont réalisés par la puissance de notre esprit, et d’autres sont guidés par notre cœur. Dans le passé, j’ai fait des choix soit en suivant mon cœur, soit en suivant ma conscience. Et peut-être est-ce un équilibre entre les deux qui serait le meilleur choix… C’est à tout cela que fait référence le titre de mon album.
Et la décision de faire de la musique, était-ce un choix du cœur ou de la raison ? J’ai suivi mon cœur, j’en suis sûr. J’espère que c’était le bon choix. Je pense que si j’avais écouté ma raison alors j’aurais certainement fait de la chanson populaire italienne (rires). L’Italie est un pays avec une population assez âgée donc jouer pour un public plus vieux aurait été un choix commercialement plus rentable. Mais je n’ai pas de regret, je remercie le reggae de me permettre de faire entendre ma voix.
Tu as écrit une chanson en hommage à John Holt qui est décédé récemment. Qu’est ce qui t’as motivé à écrire cette chanson ? Pour moi, cela a toujours été un des plus grands artistes du reggae. Quand il est mort, l’année passée, Irievibrations et moi avons eu l’idée d’enregistrer un hommage. Mais nous ne voulions pas juste faire une reprise classique d’une de ses chansons. Donc j’ai chanté le refrain original de Police in Helicopter et dans les couplets, je parle de la vie de John Holt, j’explique qui il est. C’est nécessaire parce que j’ai remarqué que les temps et les générations changent. Avec Internet, tout est plus facile d’accès mais tout se perd également dans la masse d’informations disponibles. Donc c’était pour moi une façon de dire aux jeunes : «Nous avons perdu cet artiste et voici qui il était. »
Tu as un côté très roots, musicalement, mais tu peux aussi groover en mode rub-a-dub. Est-ce important pour toi d’être flexible et est-ce que tu penses un jour aussi faire du dancehall ? Ce n’est pas vraiment bon pour un artiste de se limiter à une seule vibe. Artistiquement, je ressens le besoin de voyager entre les styles et les genres. J’ai fait du dancehall dans le passé mais c’est surtout le reggae qui me fait vibrer. Je peux occasionnellement poser sur un riddim avec des influences dancehall mais ce n’est pas vraiment ma priorité.
Quels sont tes plans, maintenant que ta mixtape est sortie ? Continuer à tourner est mon principal but pour le moment. Eventuellement commencer à travailler sur un nouvel album. Mais je veux prendre le temps. Je ne veux pas juste produire un album parce que le moment est approprié à ce stade de ma carrière, je veux garder les choses naturelles et prendre mon temps.