INTERVIEW :
Propos recueillis par : Benoit Georges & Philippe Hory
Photos : Lenshot
le vendredi 03 septembre 2010 - 32 464 vues
Le duo fraîchement reformé avait annoncé qu'il ne donnerait pas d'interviews. Et pourtant… En tournée de come-back depuis le 2 avril, avec le festival Garorock, et jusqu'en septembre, Big Red et Daddy Mory faisaient escale au Garance Reggae Festival où ils se sont produits juste avant Tarrus Riley. Présent toute la journée sur le site, visiblement content d'être là et décontracté, le combo légendaire du reggae francophone s'est prêté au jeu de bonne grâce pour nous annoncer un prochain album studio, déjà bien avancé.
Reggaefrance / Comment s’est goupillée cette reformation ? / Big Red : Depuis le jour où on s’est quitté, on guettait le moment où on allait se reformer… dans le sens où on ne s’est pas vraiment déformé ! On a juste évolué un peu pour recharger nos batteries et repartir de plus belle. Raggasonic a commencé en 1991, on a posé Ragga jam avec Solaar sur son premier album, on a sorti deux albums et on a fait un break en 98. Maintenant, on se retrouve avec deux fois plus de plaisir qu’avant, c’est un truc de dingue. On a accès à de supers plateaux et tout nos supporteurs sont là.
Daddy Mory : Ca fait super plaisir d’être là, il y a de l’amour sur chaque date, beaucoup d’émotion. C’est incroyable de voir des jeunes de 19/20 ans qui sont au rendez-vous, ça fait chaud au cœur. La musique se transmet de génération en génération.
Ce soir, vous représentez la France sur une affiche internationale et pour le public international le reggae français, c’est Raggasonic. Ca vous fait quoi de porter à nouveau ce flambeau ? Daddy Mory : C’est clair que c’est un honneur pour nous de jouer ce soir et d’être entouré de grands artistes comme John Holt, Tarrus Riley… Je ne m’en lasse pas. Il faut dire que je dois tout à la musique et que j’aime ce métier.
Quels artistes ne voulez-vous pas rater ? Daddy Mory : On va aller voir Tarrus Riley, c’est la relève.
Big Red : Oui, on sera là c’est sûr.
Qu’importe ce qui est arrivé, c’est terminé maintenant, on emmerde le passé, on avance, on a encore des trucs à donner Qui a été à l’initiative de votre rapprochement ? Daddy Mory : On s’est vu pour en parler, sans savoir si le truc allait se faire ou pas. On voulait voir s’il restait quelque chose de nous, on ne voulait pas le faire seulement pour l’argent. Quand on s’est vu, ça a tout de suite collé, naturellement.
Big Red : Il a fallu du temps, il y a eu des histoires. Qu’importe ce qui est arrivé, c’est terminé maintenant, on emmerde le passé, on avance, on a encore des trucs à donner. Mory et moi, on a un truc, une alchimie. Il me manquait quelque chose dans ma carrière solo, Mory pareil. On est content de se retrouver pour se compléter à nouveau. Nous n’avons pas chômé ses 12 dernières piges : Mory a fait une multitude de concerts, de sounds et d’albums, la même pour moi, dans différents styles. Tout s’est bien passé, grâce à Dieu. Aujourd’hui, on ramène du bagage avec nous.
Vous vous retrouvez à nouveau face à face sur la même scène, qu’est-ce qui a changé chez vous en 10 ans ? Daddy Mory : Avant, on était un peu plus fou dans nos têtes. On avait un peu moins de responsabilités. Aujourd’hui, nous sommes plus matures, avec un jugement plus ouvert sur les choses. Avant, on venait juste de sortir de l’underground, du milieu sound system, on était marqué par cet univers, on avait encore des propos brut de décoffrage. Aujourd’hui, les 10 années que nous avons passées chacun de notre côté font que nous avons une expérience en plus. Ca nous a fait mûrir, c’est sûr. Aujourd’hui, on est plus fort.
Y a-t-il des artistes sur la scène française que vous considérez un peu comme la relève de votre travail de ces 15 dernières années ? Daddy Mory : Bien sûr, il y a pas mal d’artistes qui se sont inspirés de Raggasonic. C’est normal dans le reggae. Personnellement, je travaille avec pleins d’artistes. Directement ou indirectement, il y a pleins d’artistes à qui on a donné de la force, du style… J’ai monté un collectif de deejays en 2003, qui s’appelle Showsky Familly, dans lequel on retrouve Mad Killah, Leevayah B ou Mr Face. Ce sont des jeunes qui ont beaucoup d’amour pour moi et pour Big Red aussi, et ils ont du talent…
La relève est assurée ? Daddy Mory : C’est clair, il y a pleins de jeunes qui ont la "niaque"… Le seul truc qui leur manque, c’est la vraie passion de la musique, le fait de se démener pour la musique, ce qu’on avait avant et qui n’existe plus maintenant. Aujourd’hui, tout est accessible, tu veux un son, tu vas sur internet, tu tapes le nom du son et voilà. Il faut se rappeler qu’à l’époque, on allait jusqu’à Londres juste pour acheter des cassettes de sound systems ! Il y a plus de facilité aujourd’hui, mais ça n’enlève rien au talent.
Où en sont vos nouveaux morceaux, êtes-vous retournés en studio ? Big Red : Oui, c’est déjà fait ! On travaille dessus. A la base, quand on s’est parlé Mory et moi, le projet c’était de faire un album. On nous a un peu tannés pour qu’on tourne. Mais je ne vais pas te mentir, on ne s’est pas fait tanner longtemps et on ne regrette pas. Mais le projet initial, c’était de refaire un album, donc on se concentre pour faire un truc cool…
Qui sortira… ? Big Red : En 2011, en début d’année.
Daddy Mory : Le public ne saura pas à quoi s’attendre, surtout les jeunes qui ne nous connaissaient pas à l’époque. Mais ce sera du Raggasonic, reggae, frais et avec Frenchie aux commandes.
Vous avez prévu des featurings en Jamaïque ? Daddy Mory : Pour l’instant, c’est nous et nos gueules… Je fais une combinaison avec un gars qui s’appelle Big Red !
Big Red : Moi, je développe un petit artiste qui s’appelle Mory, il a du potentiel ! Pour le moment, on a d’abord à faire avec nous. Il y aura certainement des featurings inopinés, des trucs qui arriveront de façon spontanée, parce qu’on n’aime pas trop calculer ce genre de choses… En espérant qu’il se passe des choses magiques, lors de rencontres, comme on en a eu la chance plusieurs fois par le passé. Il ne faut pas forcer le destin.
Il y a quelques clashes au programme pour des sounds français, vous seriez prêts à les soutenir en enregistrant des dubs pour eux ? Daddy Mory : Bien sûr. Moi, je soutiens les sounds français. Je n’habite pas en Suisse, même si je respecte les Suisses. J’aime le clash, j’adore ça, tant que ça reste musical et professionnel. Je suis à fond pour les Français : big up Soul Stereo et Guiding Star !
Qu’est-ce qui tourne en ce moment dans vos écouteurs ? Daddy Mory : Pour moi, c’est When the heathen rise de Movado. Un big tune !
Big Red : Moi, je suis plus nostalgique, je suis sur Sade, le nouvel album, "Soldier of love". Du coup, je me réécoute tous les autres albums, Is it a crime, Smooth operator… et pas mal de trucs UK.
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