INTERVIEW :
Propos recueillis par : Benoit Georges
le lundi 10 octobre 2005 - 13 008 vues
Premier sound « étranger » à avoir remporté le trophée du World Clash sur le terrain des yardies, le sound system Mighty Crown de Yokohama a su se faire une place dans l’univers impitoyable des sounds internationaux. Mighty Crown est plus qu’un sound system, véritable moteur de la scène reggae japonaise depuis maintenant douze ans, ils gèrent également une émission de radio, un fanzine, une ligne de vêtements et un label. Retour avec Masta Simon, selector et fondateur du sound, sur ce phénomène nippon qui a révolutionné le « clash business ».
Reggaefrance / Peux tu nous raconter les débuts de Mighty Crown ? / Masta Simon : Nous avons crée le sound system en 1991 à Yokohama. Nous étions des amis passionnés de reggae, nous avons commencés à jouer dans des clubs et à nous faire connaître par le biais des mix-tapes. Une partie du crew est partie à New York quelques temps après pour s’installer à Brooklyn, afin d’être au plus près des vibes de la Jamaïque. Après avoir construit notre système d’enceintes, nous avons clashé tous les sounds du Japon afin de devenir les champions du Japon.
A cette époque vous jouiez déjà à New York ? Quand nous sommes arrivés à NYC, nous avons commencés à jouer dans quelques clubs et divers juggling à Brooklyn, mais à cette époque nous n’étions pas prêts pour les clashs internationaux. Nous avions encore beaucoup à apprendre des gros sounds que nous allions voir à Brooklyn, notamment pour les clashes mémorables au Biltmore Ballroom.
Après votre victoire impensable au World Clash 99 à Brooklyn, on aurait pu penser que vous aviez fait vos preuves mais cela ne fut visiblement que le début….. C’est vrai que gagner son premier clash international contre un sound comme Killamanjaro a surpris beaucoup de monde. Cela nous a donné du respect mais aussi beaucoup de critiques. C’est à ce moment que nous avons vraiment pu montrer la qualité de notre sound system en allant clasher tous les sounds, sur tous les continents et ce depuis 99.
Quel est le premier dubplate jamaïcain que vous avez enregistré ? Quels sont les artistes préférés de votre dub-box ? Notre premier dubplate jamaïcain a été enregistré en 1992 avec Nicodemus à Brooklyn. Nous aimons tous les dubs de Mighty Crown, mais par exemple, certains de nos Jah Cure ou Buju Banton sont devenus des anthems de notre sound.
Vous avez joué un dubplate de 50Cent au World Clash 2003, quelles sont vos références en Hip Hop ? On écoute du rap depuis les années 80, avant même d’écouter du reggae, on respecte les artistes old-school comme Run DMC, Eric B & Rakim, Pubilc Enemy, KRS-One et des rappeurs comme Nas, Notorious Big, Tupac, Jay-Z….
Justement comment êtes-vous passés au reggae ? On avais des amis de notre ville qui traînaient dans des clubs reggae. On était adolescents à l’époque et comme beaucoup de jeunes, on trouvait ça cool. On en est venu alors à faire nos propres soirées.
Comment faites vous pour jouer en même temps aux Etats-Unis, en Jamaïque et au Japon ? Combien êtes-vous en tout ? En fait, on a des selectors qui jouent en même temps dans différents endroits du monde. Nous sommes cinq : moi-même, Masta Simon, fondateur et MC de Mighty Crown, Sami-T (selector et MC), Super G (selector et MC). Il y a aussi Cojie au Japon, qui joue des foundations, et Ninja qui mixe en juggling.
Comment se porte la scène reggae au Japon ? La scène japonaise est encore en train de se développer, il y a dix ans le reggae était bien présent avec des gros évènements comme le Japan-Splash mais c’est retombé. Nous n’avons jamais cessé de promouvoir cette scène. Depuis notre victoire en 1999, ça a explosé et je crois que la scène se porte de mieux en mieux.
Vous travaillez avec des artistes japonais depuis longtemps maintenant. Quels sont les projets ? On manage des artistes comme Fireball et Papa B. On a aussi notre label qui s’appelle Lifestyle Records et chaque fois qu’on sort un morceau, on le retrouve parmi les 30 meilleurs des charts japonais. On prévoit de se consacrer un peu plus à nos productions en collaborant avec des artistes étrangers. On aimerait également s’exporter vers les Etats-Unis, l’Europe et la Jamaïque. Après 12 ans d’activité nous considérons que nous sommes encore en pleine croissance, en plein apprentissage. Nous espérons qu’un jour la musique sera simplement une affaire de musique et pas le fait de savoir d’où tu viens. On veut promouvoir le reggae de haut niveau afin qu’il puisse être accepté partout.
Comment s’est passé votre premier séjour en Jamaïque ? Notre premier voyage en Jamaïque ne s’est pas très bien passé. On a séjournée au mauvais hôtel, au mauvais moment. C’était vraiment un choc culturel : partout où on allait les gens nous demandaient de l’argent juste parce qu’on étaient japonais. Tout le monde essayait de nous vendre quelque chose. Nous, on se disait « mais qu’est-ce qui se passe avec eux ? ». A force, nous avons appris à connaître les comportements des Jamaïcains et maintenant tout se passe bien : en général nous allons en Jamaïque quatre à cinq fois par an. On y reste entre une semaine et un mois.
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