INTERVIEW :
Propos recueillis par : Alexandre Tonus
Photos : Martei Korley
le mercredi 28 juin 2006 - 18 544 vues
Depuis "Gangsta Blues" en 2004, elle règne sans partage sur le dancehall féminin. Elle a même plongé dans l'ombre le phénomène Lady Saw, égérie slackness des années 90. La période n'est plus à des textes explicites et crus, mais à des paroles mûries et réfléchies. Rencontre avec la diva du dancehall.
Reggaefrance / Tu vas sortir un nouvel album pour VP, qui s’intitule “Rebelution” ; peux-tu nous donner plus de détails sur ce projet ? / L’album sortira le 29 août chez VP Records. Il y a 20 plages dessus, dont un poème, l’intro, qui est une sorte de note de départ, et deux interludes. Il y a donc 16 chansons entières. C’est un peu dans la continuité du genre d’ambiance qu’on pouvait avoir sur “Gangsta Blues”. Ce n’est pas ce qu’on peut appeler un album dancehall, qui ne contient que des chansons pour danser, qui n’est fait que pour la danse et la fête et qui se limite aux thématiques habituelles du dancehall. Cet album va plus loin que ça. Il incite à la discussion sur de nombreux problèmes qu’il révèle, qu’il démasque en quelque sorte quand je parle des choses basiques. J’ai l’impression que c’est un très bon forum. Les gens m’écoutent et ils attendent de moi que je dise quelque chose qui, au moins, lancera une discussion. Et je me sens obligée de faire ça. J’ai abordé certains sujets, dont, si vous me connaissiez, si nous étions amis, nous discuterions entre nous de toute façon. Car je passe tout mon temps à essayer de résoudre mes problèmes, ceux de ma communauté et ceux mon entourage. J’ai abordé de nouveaux sujets. Je parle de racisme, d’agression sexuelle, de toutes ces choses dont il est difficile de parler pour tout le monde. Mais c’est un choix de ne pas rester assis et d’en parler de plusieurs manières. En abordant ces problèmes sous différents angles, sur l’album, j’espère que je pourrais apporter quelques éclaircissements sur notre situation.
Qui sont les producteurs et les musiciens avec qui tu as travaillé pour cet album ? La majorité des chansons est sur Tarantula Records, le label que je dirige avec mon partenaire Andre. C’est lui qui a écrit la plupart des musiques. J’ai aussi fait certaines chansons avec d’autres producteurs, comme Free Willy, Barry O’Hare et un nouveau venu, qui s’appelle Biggy. Je ne suis plus sure du nom de son label, mais j’ai travaillé avec Biggy, il est sur Irie FM. Si j’oublie quelqu’un, je suis vraiment désolée, je n’ai aucune copie de l’album sous les yeux pour vous dire ça. Emil Gotthard, qui est quelqu’un que j’ai rencontré quand je vivais en Suède et avec qui j’ai travaillé quand j’ai signé chez Warner ; je continue à travailler avec lui. C’est vraiment un bon musicien et j’adore son style. Je le respecte beaucoup et j’essaye de le faire participer à tout ce que je fais ; et il a travaillé sur l’album lui aussi. C’est lui qui a composé le premier single, These streets. Je crois que j’ai fait le tour de tous les gens qui ont travaillé sur l’album.
These streets est déjà un gros hit aux Etats-Unis. Comment cette chanson a été reçue en Jamaïque ? Nous n’avons encore fait aucune promotion de cette chanson en Jamaïque. Nous ne l’avons envoyée qu’à peu de gens. Mais d’après eux, l’accueil a été bon un peu partout. Nous ne venons de la sortir en 45t que la semaine dernière. Le reggae montre son amour ; cette chanson est jouée par ceux qui l’ont, elle est beaucoup jouée, et je reçois plein d’échos des gens dans la rue. Il semblerait donc que cette chanson est en bonne position.
Peux-tu nous en dire plus sur le sens de These streets ? C’est une chanson qui prend le point de vue d’une femme qui vit avec un dealer. Je sais que c’est quelque chose de typique chez les gens ; quand ils parlent de drogue, la chose la plus facile à faire, c’est de dire qu’il ne faut pas y toucher. On cite toujours ce commandement et on le délaye. Mais je ne crois pas à ça, je parle de la vraie vie. Ils continueront à faire ce qu’ils font, que je leur dise qu’il ne faut pas le faire ou pas. Mais on doit rester pratique. Il y aura des répercussions selon la manière dont on s’est préparé à s’occuper d’eux. L’une d’entre elles est qu’habituellement ceux qui vendent ces drogues sont tout le temps dans la rue, leurs femmes restent à s’occuper de la maison et des enfants et ne les voient presque jamais. Mais quand les problèmes surviennent, les seules personnes sur qui ils peuvent compter sont ces femmes. Mon opinion est qu’il ne faudrait vraiment pas attendre que les problèmes apparaissent pour commencer à passer du temps avec elles, car ils n’auront pas le choix, ils devront leur accorder du temps et leur témoigner du respect une fois épuisés par leurs problèmes. C’est de ça que la chanson parle. Ces rues ne t’aiment pas. Ce n’est qu’un endroit dans lequel tu erres. Je suis la femme qui t’aime et tu devrais me témoigner du respect pour ça.
Il y a aussi Who is Tanya ; quel est le but de cette chanson ? Qui est Tanya ? C’est assez autobiographique. C’est un rapide synopsis de ce que j’appellerais une autobiographie. C’est malheureux, mais dans l’industrie du reggae et du dancehall, je ne crois pas que les femmes soient prises au sérieux. C’est facile pour nous d’entrer dans ce milieu, mais ce n’est pas facile d’être prises au sérieux. Par exemple, si un homme avait fait What a day, The other cheek, It’s a pity ou n’importe laquelle de ces chansons populaires sur “Gangsta Blues”, si un homme avait fait “Gangsta Blues” tout simplement, il serait perçu comme un héros populaire. Tanya Stephens a fait cet album. Dans la rue, les gens applaudissent encore vraiment, mais dans le milieu, cette reconnaissance est accordée très à contrecoeur. Je pense que j’ai mérité mon droit d’entrée dans cette industrie. On ne me fait pas de cadeaux, mais j’ai tout fait pour mériter ma place. Quand le dernier album est sorti, tout le monde prenait un air nonchalant, en disant : «oui, c’est bien, mais on s’attendait à ce que ce soit bien». Malgré ce qu’en a dit le milieu, les gens dans la rue continuent à l’acheter et ils continuent de dire que c’est très bon, que c’est super. Mais dans l’industrie elle-même, en Jamaïque, on fait comme si c’était oublié. Cette chanson est une preuve que je suis consciente qu’ils essaient de ne pas voir ce que je fais. Je ne pense que ce soit un complot, je ne fonde pas mon explication sur une hypothèse de complot. Je ne me sens pas triste, je ne m’apitoie pas sur mon sort, mais je dis juste que je sais qu’ils essayent de ne pas voir ce que je fais. C’est pourtant significatif et je demande qu’on le respecte.
Still a go loose sonne déjà comme un tube de l’été, grâce à ce style crossover. Y aura-t-il d’autres chansons de ce genre sur l’album ? En effet oui. J’ai essayé de donner un maximum de ce que j’avais sur cet album, car j’estime qu’acheter un album est un investissement. On dépense beaucoup d’argent en l’achetant et c’est quelque chose à laquelle on s’attache. On pourrait s’en défaire, mais on n’en aurait alors pas pour son argent. Je sens comme une obligation de gagner cet argent plutôt que de simplement le prendre sans m’importer de ce qu’on reçoit en retour. Je veux qu’on sache qu’à chaque fois qu’on voit le nom de Tanya Stephens, on peut fermer les yeux et faire confiance à ce qui l’accompagne, car je ne manquerai jamais de respect à cet argent, à cet investissement. J’essaye donc de donner mon maximum. Si ça sonne comme de la pop, ça me va. En ce qui concerne la musique, je viens pour le reggae, je suis une enfant du reggae et mes influences seront toujours le reggae, mais je suis une musicienne, je suis une artiste, je suis obligée de donner. Quel que soit l’album que je vends, je suis obligée de donner pour qu’on en ait pour son argent. Et c’est ce que j’essaye de faire. Heureusement, j’y suis parvenu et j’avais encore plus d’idées que je n’ai essayé d’en mettre sur l’album.
D’où vient ce changement dans ta carrière ? Qu’est-ce qui t’a décidée à mélanger les styles et à t’éloigner un peu du reggae et du dancehall de base ? Je grandis, tout simplement... La maturité exige que je m’améliore. Chaque chose que je fais doit être meilleure que la dernière chose que j’ai faite. Je grandis simplement. Je mûris, je prends de l’âge, je deviens plus sage et je ne fais que montrer tout ce que j’ai appris.
Es-tu d’accord pour dire que tu à développé un dancehall sexy plutôt que slackness ? Tu parles toujours d’amour et de sexualité, mais avec plus de maturité aujourd’hui. Oui, je suis d’accord avec ça. Je pense que c’est beaucoup plus séduisant d’être suggestive et imagée que de dire des bêtises, d’être crasse et grossière. Je ne suis pas embarrassée par le sexe. En fait, j’adore ça. Je pense que ça n’a rien qui mérite qu’on en ait honte. Mais je pense qu’il y a des manières de l’aborder qui sont vraiment dégoûtantes. Il y a des façons dont je ne veux pas en entendre parler et tout spécialement pas en public, ni devant mes enfants, ni devant les enfants de qui que ce soit. Je crois donc que nous avons une obligation en ce sens. Il me semble que c’est mieux de suggérer les choses. Je pense en fait à ce qui est divertissant et je ne crois pas que ce soit divertissant de juste me dire que tu vas mettre ton membre dans mon réceptacle et que nous allons faire l’amour. Ce n’est pas divertissant, car nous pouvons tous le faire. Je n’ai pas besoin d’enseigner ça, car on le sait d’instinct. L’être humain sait comment se servir de son corps. Personne n’a besoin de lui dire, car ça lui semble logique. Je ne pense pas servir de grandes causes en disant des choses que l’on sait déjà. Si je partage certaines expériences, il faut au moins que ce soit distrayant ou spirituel. Il faut que ce soit des mots que peuvent écouter les gens et c’est pour ça qu’avec le sexe, j’évite l’excès de franc parler. J’essaye de rendre ça un petit peu plus imagé, car, comme je l’ai déjà dit, on sait déjà tout ce qu’il faut savoir sur le sexe. Tout ce dont on a besoin à propos de sexe, c’est du divertissement. Il n’y a aucune leçon à donner à ce sujet ; à part peut-être dire qu’il faut se protéger. Mais même ça, on le sait déjà. Si je dois parler de ça, il faut que je trouve une autre manière de le dire. Il faut que j’en parle comme personne n’a l’habitude d’en entendre parler.
Avec le succès de “Gangsta Blues”, et tout particulièrement du hit It’s a pity, tu passes maintenant sur MTV ; est-ce que cela a changé quelque chose ? Cela a-t-il eu un impact sur ta carrière ? L’accueil réservé à ce single et l’importance de son succès commercial ont joué un rôle très important dans le développement de ma carrière. Ils continuent de jouer un rôle très important. En ce qui concerne le talent que tu penses avoir dans ce milieu, si personne d’autre sur le marché n’est de ton avis, personne dans ce milieu ne sera de ton avis. Donc, plus tu as de succès commercial, plus tu es exposée, plus l’accueil réservé est bon et plus ta carrière se développe bien sûr. Tout dans mon succès a contribué à augmenter encore et encore mon succès. Et pour ce qui est de It’s a pity tout spécialement, ça y a sacrément contribué.
As-tu des projets de duo avec des artistes pop ou hip-hop, comme d’autres grands artistes jamaïquains l’ont fait avant ? Je suis ouverte à tout ce qui a un sens. Je n’ai pas de projet spécifique à ce sujet pour l’instant. Il n’y a pas d’artiste que je recherche ou avec qui je veuille m’associer, ni d’artiste qui m’appelle pour qu’on fasse quelque chose ensemble. Ca dépend vraiment beaucoup des agents en fait. En ce moment, je n’ai pas de projet immédiat de faire ça. Mais je reste ouverte et bien sûr, si quelqu’un aime mon style et veut faire quelque chose, je serai présente. Je cherche aussi à retravailler avec Lanny, de Germaican Records, qui a produit It’s a pity. Nous parlons de travailler plus, car nous pensons que les choses que nous faisons ensemble sont bonnes. Je suis prête à travailler avec tout ceux qui feront quelque chose qui a du sens, mais je ne travaillerai bien sûr pas avec qui que ce soit dont le succès commercial ne reposerait que sur ce qu’il a fait avec moi.
Tu es définitivement devenue une artiste internationale ; quelle est la prochaine étape pour toi ? Je n’ai aucune limite. Tout ce que je peux imaginer, j’en viens à penser que je suis capable de le faire. Je vais faire plus de musique. Je vais sans aucun doute essayer de surclasser la dernière chose que j’ai faite. Cet album est déjà fini. Nous sommes prêts à le servir au public désormais. La seule chose qui reste à faire est de le présenter aux gens et de leur dire que s’ils veulent l’acheter, ils peuvent. A partir de là, mon devoir personnel est de m’améliorer grâce à cet album. Je dois sortir aussi et le présenter physiquement aux gens. J’aime vraiment aller à la rencontre des gens. Au-delà de ça, pour toute autre chose qui se présenterait au nom du divertissement, je suis preneuse. Je me suis aussi engagée dans une carrière littéraire, dans le but de faire connaître mes poèmes. Car j’écris des poèmes, j’écris aussi des nouvelles. Je cherche donc aussi à faire ça. J’avais mis mon éducation en pause depuis un moment, car c’est vraiment dur d’arrêter l’école, vraiment très dur. Mais j’ai toujours des progrès à faire, je dois retourner à l’école et faire ce dont je me sens obligée pour moi-même. Ca complète les bases de mon éducation. En bref, j’ai plus de choses à faire que je n’ai de temps pour les faire.
En parlant de poésie, j’ai lu que tu avais participé au festival littéraire de Calabash ; peux-tu nous parler de cette expérience ? Il me semble que tu as pu rencontrer des poètes d’un peu partout dans le monde et partager tes connaissances et tes talents avec eux. C’était une expérience vraiment très rafraîchissante pour moi, quelque chose de différent. J’ai l’habitude d’être présentée pour ma musique ; donc parler aux gens était quelque chose de complètement différent. J’ai juste dit quelques réflexions tranquillement et j’ai adoré ça. J’ai rencontré certaines personnes vraiment très intéressantes. Socialement, c’était quelque chose de très différent du monde de la musique, où il y a tant de choses superficielles. Je crois que j’ai vraiment aimé ça. C’était authentique. Il y avait plein de gens qui recherchent ce que je recherche et la plupart des poètes que j’ai rencontrés se perfectionnaient en échangeant les uns avec les autres. C’était plus spirituel et j’aime vraiment bien ça. Ca se passe dans un très bon esprit et j’invite toute personne créative à essayer. Tout le monde devrait essayer, c’est vraiment bien. Que tous ceux qui peuvent aller au festival de Calabash l’année prochaine y aillent. Je ne travaille pas pour eux et je ne gagne rien à leur faire de la publicité. Je veux juste dire aux gens que c’était magnifique, que j’ai adoré et que c’était vraiment rafraîchissant. Et j’invite tout le monde à s’y rendre.
Quand nous nous sommes rencontrés la dernière fois, tu nous as dit que tu ne voulais pas être un modèle à suivre pour les gens, mais ta place aujourd’hui dans l’industrie musicale jamaïquaine et ton statut de poétesse te forcent à en être un dans un certain sens, non ? Malgré ce que tu es ou ce que tu fais, il y aura toujours quelqu’un, quelque part, pour te suivre, mais je préfère ne pas me désigner comme quelqu’un qu’il faut suivre. Je ne suis qu’un être humain, comme tous les êtres humains qui me suivent. Donc, à chaque fois que je fais une erreur et que quelqu’un me suit, je ne veux pas qu’il fasse mes erreurs. Quoi que j’apprenne, je le partage avec lui et quoi qu’il apprenne, il le partage avec moi et comme ça, chacun peut apprendre l’un de l’autre. Il n’y a aucune personne pour toujours guider tout le monde. J’ai une fille et je veux être un bon modèle pour elle. Je lui dit : ''Ta mère est très humaine, elle a fait un tas d’erreurs''. Je ne veux pas qu’elle fasse les mêmes erreurs que moi. Elle grandira en faisant ses propres erreurs et l’expérience s’accroîtra. Je le dis à tout le monde : je ne veux pas être un modèle, ça serait un fardeau que je ne veux pas sur mes épaules.
Tu es une grande influence pour la chanteuse Cecile. Quelles sont tes relations avec elle ? C'est une question difficile… Pendant des années, on était vraiment bonnes amies, je peux dire sans mentir qu'elle a été ma meilleure amie, avant même que je ne perce. Malheureusement, quand j'ai été plus exposée en tant qu'artiste, sa maturité en a vraiment pris un coup. Je ne peux pas mentir : j'ai le cœur brisé. C'était la seule amie que j'avais, et soudain, des choses ont commencé à arriver. J'ai pensé que peut-être, je lui avais appris quelque chose. Mais malheureusement non, elle croit en ce mode de vie superficiel. L'industrie musicale est remplie de superficialité. Presque tout est centré sur le divertissement, c'est puant. Quand on parle de médias, le mode de vie que l'on construit autour de nous, de nos personnages, de nos carrières, tout ça n'est pas réel.
Quand on se laisse entraîner là-dedans, c'est triste. De commencer à penser que le monde de la scène existe réellement. C'est tout simplement triste. Donc nous ne sommes plus amies désormais. Mais n'en parlons plus, je lui souhaite le meilleur. Je l'aime toujours beaucoup, forcément. Je lui souhaite beaucoup de succès, et j'aimerai la revoir de nouveau concentrée, et redevenir la personne qu'elle était. Reconnectée à sa réalité, et à la hauteur de son potentiel. Elle en a beaucoup, je sais de quoi elle est capable.
Comment regardes-tu la jeune génération du dancehall féminin ? Sont-elles une menace ? Une menace ? Je ne pense pas que quiconque soit une menace. La seule personne qui pourrait être une menace, c'est moi-même. Si je ne suis pas à la hauteur des espérances de mon public, alors là je suis une menace pour moi-même. Si je ne fais pas ce que j'ai promis de faire. Personne d'autre ne peut battre Tanya Stephens. Si quelqu'un arrive et s'avère être meilleur que moi, je lui donnerai tout mon respect, mon amour; mon soutien et ma bénédiction. Tout le monde a besoin d'un challenge, et la compétition peut être positive. En fait, j'adorerais que ce soit le cas, mais aujourd'hui je ne vois personne qui puisse le faire.
La Jamaïque a une femme à sa tête désormais, Portia Miller. Qu'en penses-tu ? Je ne la connais pas assez bien pour savoir ce qu'elle a accompli dans le passé, et si elle n'est pas à sa place. Je ne peux pas la juger. Je regrette la manière dont elle est arrivée au pouvoir. Parce que je ne l'ai pas choisie, elle a atterri dans ma vie. Un matin, on a appris que c'était elle qui était au pouvoir, installée par ses amis. On n'avait pas notre mot à dire (les élections se font au suffrage indirect, ndlr). C'est vraiment déplorable. Son parti, le People National Party, était au pouvoir avant que j'ai ma fille, et elle va sur ses 12 ans… Ils sont au pouvoir depuis 1989 je crois. Elle a toujours été un des maillons forts de ce parti et si elle n'a rien accompli avant, alors je ne peux pas dire que je voterai pour elle, parce que je ne sais pas si elle fera plus en tant que chef du parti. Je ne sais vraiment pas. Le temps nous le dira…
Le fait que ce soit une femme changera-t-il les choses en Jamaïque ? Une femme peut-elle s'imposer sur la scène politique jamaïcaine ? Le fait que l'on débatte encore de femmes ou d'hommes me rend triste. Les gens devraient être jugés pour leur mérite, leur actes, et non pas leur sexe. Je m'en fous que ce soit une femme. Si une femme met à mal le pays, ce ne sera pas moins grave que si c'est un homme. Je me fous du sexe. Je veux juste savoir que le pays est bien géré. Si j'ai une fuite, il me faut un plombier, peu importe que ce soit une femme ou un homme.
Tout le monde peut tout faire, à part donner la vie. Et j'ai hâte que même ça puisse arriver, parce que c'est douloureux et je veux bien qu'un homme le fasse à la place ! I'm not into gender at all…
Es-tu engagée politiquement ? Politiquement ? Bien sûr, je le suis toujours, parce que je vis dans un environnement politique. Je ne suis pas affiliée à un parti en particulier. Je suis Jamaïcaine, je le serai toujours, et je donnerai mon soutien à quiconque aura à cœur de servir les intérêts du pays. Et si je vois que ce qui est fait est bon pour la Jamaïque, je ne retirerais jamais mon soutien. Je le soutiendrai parce que je suis Jamaïcaine, je vis ici avec mon enfant, ma famille, mes amis. Et je veux ce qu'il y a de mieux pour mon pays.
|
|