Focus
Date de mise en ligne : mardi 08 janvier 2008 - 22 861 vues Bilan 2007
2007, c'est fini. Maintenant on peut sortir nos calepins et faire les comptes de l'année. Qui sont les artistes qui ont marqué l'année de leur empreinte ? Quels concerts, riddims et labels se sont distingués ? Bref, que faut-il retenir du cru 2007 ? Les réponses de la rédaction.
Jah Cure : L'événement de l'année, indéniablement, c'est lui. Qu'on le veuille ou non, Jah Cure a marqué 2007 de son empreinte. Le chanteur est sorti de prison cet été, après huit ans passés derrière les barreaux. Huit ans pendant lesquels sa notoriété n'a cessée de grandir, à coups de soutiens réguliers (Capleton, Sizzla, Jah Mason, Fantan Mojah…) mais aussi et surtout de nombreux hits. Cette année, Sticky et To your arms of love ont rejoint Longing for, Love is, Nah build great man et True reflection dans les charts. Une nouvelle carrière s'ouvre à lui.
Tarrus Riley : Son album "Parables" est sorti en 2006 mais c'est bel et bien cette année que Tarrus Riley a explosé. Beware et surtout She's Royal n'ont presque pas quitté les charts de l'année, faisant du fils de Jimmy Riley la sensation roots de 2007.
Beenie Man, qui a connu une année difficile entre déboires conjugaux et des problèmes à répétition avec le fisc, reste l'un des chouchous du public : avec deux number one hits (Back it up et Give it up avec Barbee), Beenie Man n'a cessé de faire parler de lui, dans les médias spécialisés comme dans les tabloïds. Ce qui ne trompe pas.
Mavado continue sur sa terrible lancée de 2006. Cette année encore, il aura placé un nombre de morceaux affolant dans les charts (Squeeze her breast, Chat too much…). Et surtout sorti un premier album remarquable (voir plus haut).
Munga : Protégé de Capleton, inventeur du concept paradoxal (qui a dit fumeux ?) de "gangsta ras" et représentant emblématique de la mode du vocoder, Munga est peut-être celui qui assurera sa deuxième jeunesse à la génération actuelle d’artistes rastas. Ou pas. En tout cas, il se bat beaucoup, et aura aussi marqué l'année pour ça.
Et aussi :
Compère de Mavado chez Daseca, Busy Signal n'était pas en reste cette année. Il s'est même payé deux singles exemplaires et n°1 (Nah go a jail et The days) aux textes taillés dans le roc du ghetto. Richie Spice, qui a encore franchi un pallier, s'est offert un très bon album avec "In The Streets to Africa". Artiste féminine de l'année, Queen Ifrica a enfin reçu l'attention qu'elle mérite, y compris celle de l'Unicef avec son titre Daddy don't touch me there. Avec sa voix cristalline, Etana a su remettre au goût du jour le bon vieux reggae soul de ses prédécesseurs. Sous l'aile de Corleon, Pressure a signé une poignée de singles convaincants dont le hit Love and Affection, titre de l'album à venir début 2008. Six ans après s'être installé en Jamaïque, Alborosie a pris son envol. Avec Kingston Town, le deejay d'origine sicilienne a rencontré le succès, tout comme Collie Buddz avec son album "Come Around". Sur les solides compositions du dubmaster Manjul (qui a sorti un nouvel album en 2007), le Guinéen Takana Zion a livré un premier album prometteur, "Zion Prophet".

- Mavado - Gangsta for Life - The Symphony of David Brooks : Construit comme un film noir, avec flingues, traîtres, ambiance glauque, figure du père disparu et chants de rédemption, "Gangsta for Life" est un concentré de liturgie "gangsta" à la jamaïcaine. Brûlant.
- Chezidek – Inna Di Road : Avec les productions ciselées de Massive B, Chezidek signe son meilleur opus en même temps que l'album new-roots de l'année. Tout simplement.
- Junior Murvin – Inna de Yard : Le falsetto de Junior Murvin magnifie le concept de Makasound. Le meilleur opus de la série ?
- Stephen Marley – Mind Control : On attendait impatiemment l'album de celui qui se cache derrière le succès de son frère Damian avec "Welcome to Jamrock". On n'a pas été déçu.
- Kiddus I - "Graduation in Zion 1978-1980" : Enfin un album pour Kiddus I qui recueille ses perles des 70's, et appelle en plus d'autres volumes à venir. Historique.

Sizzla : Parmi les premières cibles des associations de défense des droits des homosexuels, Sizzla n'était plus venu en France depuis 2003. Un manque brillamment comblé à l'issue de trois concerts à Paris (voir la vidéo)
Jah Cure au Sundance : de retour en Europe (on avait pu le voir accompagner Beres Hammond avant son incarcération), Jah Cure a clôturé le Sundance Festival cet été à Eindhoven. Au milieu d'une affiche complète, le chanteur de Papine était celui que tout le monde attendait. (lire le reportage)
Le Ja'Sound s'endort, le Garance Festival se réveille. Difficile de connaître des années calmes avec les festivals reggae. En 2007, c'est le Ja'Sound qui tirait le rideau, pendant que le Garance faisait son retour à Paris. Avec une nouvelle formule (deux soirs au Zénith plutôt qu'une nuit à Bercy) et surtout les soirées Dub Station jusqu'à l'aube, piment d'une affiche très classique (et qui ont perduré depuis). Pendant ce temps, le Reggae Sun Ska fête ses dix ans. Le Ja'Sound, lui, sera de retour l'année prochaine.
Les Zicalizes : Le festival itinérant d'Ile de France poursuit son bonhomme de chemin. En 2007, pour la 11e édition, l'affiche, répartie sur plusieurs dates, était exceptionnelle : Cornell Campbell, The Congos, The Viceroys, Tappa Zukie, Clinton Fearon, Avaran, Ijahman Levy, Kiddus I, Jamaica All Stars, Rodigan, Manjul… Vivement l'année prochaine.
Beenie Man : le retour en France de l'entertainer numéro 1 après trois ans d’absence des scènes hexagonales était l'occasion d’une séance de rattrapage pour découvrir ou redécouvrir l’immense répertoire du « Grammy Kid ». (voir la vidéo)

Côté reggae, deux riddims très reggae FM dans la veine des Drop leaf, Season et autre Cry baby se sont clairement distingués cette année : le superbe Ghetto blues de Christopher Birch tout d’abord, avec les hits Coming over de Chuck Fender et Cherine Anderson et Again de Wayne Wonder, mais aussi de très bons Fantan Mojah, Voice Mail et Christopher Martin. L’énorme Guardian angel d’Arif Cooper ensuite, et sa pléiade de tunes à succès, dont le titre éponyme de TOK, To your arms of love de Jah Cure, Give thanks for what you’ve got de Daville, The world is a cycle de Richie Spice, Over and over again de Tami Chin ou encore Take my wings de Christopher Martin.
Mais c’est surtout dans le dancehall que la créativité s’est le plus manifestée avec des productions beaucoup plus soignées qui ont donnée naissance à des riddims variés et originaux, tels que les Bluetooth et Artillery de Don Corleon, les Tremor, Dark again, Shadow et Darker shadow de Big Ship, mais aussi le Air waves de Fire Links ou le Gang war de Baby G. Autant d’instrus d’un nouveau genre, à l’image de celles de Daseca, label de l'année, et de ses deux numéros 1 dans les charts (The days de Busy Signal et What you gonna do de Bugle).
Et aussi :
Sonar Kollektiv : le label allemand multiplie les réussites en ouvrant les frontières du reggae à l'électro (Black Seeds, Eva Be, Fat Freddy's Drop…). Vivement la suite.

Le Reggae Compassionate Act : La polémique sur les textes homophobes des artistes jamaïcains a connu de nouveaux rebondissements en 2007. Au terme de trois ans de campagne Stop Murder Music, les associations de défense des droits des homosexuels sont parvenues à leur but : obtenir les accords écrits d'artistes acceptant de renoncer à chanter des textes homophobes, après avoir signé le Reggae Compassionate Act. Les premiers signataires ont été Beenie Man, Sizzla, Capleton et Buju Banton, quatre des artistes les plus visés par la campagne. Sauf que… Quelques semaines plus tard, Beenie Man et Buju Banton reviennent sur leur engagement. La lutte continue.
Le coup de gueule de Tiken Jah Fakoly : Les années passent et Tiken conserve son franc parler. Invité à Dakar pour le 7e festival international Hip-Hop Awards, du 12 au 15 décembre, le chanteur ivoirien a dénoncé a plusieurs reprises le régime du président Wade, invitant ce dernier à « quitter le pouvoir ». Ce qui lui a valu d'être "persona non grata au Sénégal".
Les rivalités entre artistes : D’un point de vue compétition et rivalités, 2007 aura été une année très chaude. Entre artistes tout d’abord, puisque hormis les habituelles frictions entre Bounty Killer et Beenie Man, c’est toute la nouvelle génération qui est entrée en guerre. Vybz Kartel et Mavado, Busy Signal et Aidonia, Sizzla et Norrisman, Chino et Munga, Flexx et Deva Bratt… on ne compte plus les accrochages entre artistes, à la scène comme à la ville. Et le plus dramatique est que de simples provocations verbales, on est très souvent passé à des affrontements physiques lamentables. Ce « phénomène », loin d'être nouveau, a atteint un tel niveau que les producteurs ont fini par s’en mêler aussi, se constituant de véritables écuries où les artistes paraissent autant de petits soldats prêts à livrer bataille. Heureusement, cette tendance pourrait, grâce à ces mêmes producteurs, reprendre une orientation plus artistique et répondre à des motivations plus musicales.
Le vocoder : Un peu comme un diesel, la tendance des Jamaïcains à utiliser le vocoder (ou autotune) sur les productions s'est largement imposée en 2007. Aujourd'hui, difficile d'y échapper. Nanko, Gyptian, Collie Buddz hier, aujourd'hui Demarco et Sean Kingston. Marque de fabrique de Munga, propulsé par les producteurs Corleon et Daseca, le vocoder a été adopté par les plus gros noms du dancehall : Mavado, Vybz Kartel, Busy Signal, Bounty Killer et même Capleton, tous ou presque y ont succombé. On aime ou on n'aime pas, mais l'autotune nivelle les performances vocales, et noie les différences de chacun sous une nappe digitale. Demain, tous pareils ?

Lucky Dube : 2007 restera marqué par ce drame. Lucky Dube est mort le 18 octobre, victime des balles des voleurs qui tentaient de lui dérober sa voiture, dans la banlieue de Johannesburg. Le pays tout entier a rendu hommage au chanteur, le président Thabo Mbeki saluant un artiste "exceptionnel et réputé dans le monde entier". Présentés devant la justice, ses assassins seront jugés le 18 janvier. Avec son dernier album, "Respect", en 2006, Lucky Dube laisse derrière lui 21 albums.
Natasja : Un accident de voiture en juin a mis fin à son ascension. D'origine danoise, Natasja était la première artiste non-jamaïcaine à remporter le tremplin Irie FM. Ce qui n'est pas rien !
Tyrone Taylor : Il a connu son moment de célébrité en 1983 avec son hit lovers rock Cottage in Negril. Le chanteur, qui avait cinquante ans, est décédé dimanche 2 décembre à Kingston, des suites d'un cancer.
Craig Dennis : Membre de l'écurie Big Ship, ce jeune chanteur aura tout juste eu le temps d'enregistrer quelques titres, dont deux combinaisons avec Vybz Kartel, avant de trouver la mort dans un accident de la route.
Et aussi :
Blood & Fire : Le reggae a perdu un de ses labels les plus prolifiques. Beaucoup d'amateurs de reggae ont fait leurs premiers pas guidés par les brillantes rééditions du label anglais. Fermé depuis juillet (y compris la boutique en ligne), son catalogue est désormais disponible numériquement sur le web.
Reggae MC : Le magazine qui voulait jouer la carte d'un reggae moins spécialisé, ouvert aux autres publics, aura finalement échoué. Incapable de trouver son lectorat, Reggae MC n'aura pas passé le cap de la première année.
Ragga Magazine : Et de deux. Depuis des années, on savait que le mensuel reggae n°1 avait la santé fragile. Bon an mal an, Ragga était devenu le doyen des mensuels reggae. Les mauvais résultats auront finalement précipité la chute du magazine. Ca y est : il n'y a plus de mensuels reggae en France.
Pour 2008 on attend, dans le désordre :
- La consécration de Busy Signal
- Les nouveaux albums de Groundation, Damian Marley, Luciano
- Le premier album de Munga chez Corleon
- Le retour du Scare Dem Crew : d'abord un featuring avec l'Alliance puis un single… prochaine étape, l'album ?
- Le jeune I-Octane, qui dessine une courbe ascendante
- Stephen McGregor, fils de Freddie et boss du studio Big Ship qui s'est installé parmi les "top producers" de Kingston
- Le réveil du Ja Sound, après une bonne gueule de bois
- L'avènement de Rootz Underground, la formation de Steve Newland
- Le retour de Warrior King ? Et pourquoi pas ?
- La confirmation d'Idonia
- La fin de l'autotune, résurgence pas toujours de très bon goût du vocoder.
- Jah Cure en France
Article écrit par La rédaction
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